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Foyer de travailleurs migrants d'Aubervilliers-La Courneuve (La Courneuve, Seine-Saint-Denis)

  • Date :

    1940-1960

  • Notice historique :

    De nombreux foyers de travailleurs immigrés sont installés en Seine-Saint-Denis dans la période de reconstruction de l'après Seconde Guerre mondiale. Le foyer de la rue Crève-CSur est l'un des exemples emblématiques de cette multiplication d'un habitat à la fois rudimentaire et durable qui s'inscrit dans le paysage des communes du département. Après 1945, La Courneuve et Aubervilliers se distinguent par un parc immobilier vieillissant et la forte expansion démographique de ces communes, qui correspond à l'arrivée d'importants contingents de population étrangère et coloniale, pose avec acuité la question du logement de ces population.

    Pour remédier à cette crise du logement, les autorités publiques comptent sur une habitation spécifique, le foyer, conçu pour protéger les immigrés des «marchands de sommeil» et autres «bailleurs de misère». Le plus grand effort fourni provient du patronat. En 1953 sur les 136902 Nord-Africains présents en métropole, 39604 sont hébergés dans des lieux appelés «établissements employeurs»; 7400 personnes vivent dans des foyers créés sur l'initiative de l'État. Les services de la main-d'Suvre de la préfecture de la Seine interviennent aussi auprès des employeurs pour qu'ils créent des logements, en encourageant la création d'associations dont le but est la gestion de foyers. Ces services financent parfois la construction des bâtiments mais les frais de fonctionnement restent à la charge d'organismes séparés. Selon ce principe, deux organismes voient le jour dans la région parisienne: l'Association des foyers nord-africains de la région Parisienne (AFNARP) en 1949 et la Société civile immobilière (SCI) en 1954. En 1956, sur les quatre foyers pour travailleurs nord-africains recensés dans la banlieue nord, un seul est géré par le Service des affaires nord-africaines de la préfecture de la Seine, les trois autres, à Saint-Denis et La Courneuve, sont gérés par l'AFNARP.

    Les entreprises saisissent l'intérêt d'investir dans les foyers pour héberger la main-d'Suvre nord-africaine, réputée mobile. L'employeur souscrit un lit pour 50.000 francs à fonds perdus, imputable sur le 1% patronal. La location d'un lit est conditionnée à la possession d'un contrat de travail dans une des usines fondatrices du foyer. Sur les 70.000 travailleurs nord-africains recensés dans le département de la Seine en 1951, seule une minorité d'Algériens, 5%, était concernée par l'hébergement en foyer. Par la suite, durant la Guerre d'Algérie, la création de la Société nationale de construction de logements pour les travailleurs algériens (Sonacotral), en 1956, donne corps à une politique nationale d'envergure en matière de logement pour les travailleurs algériens. Ces derniers sont confinés dans des foyers dont l'objectif fondamental était de convaincre les Algériens que leur présence sur le territoire métropolitain devait s'inscrire dans le temps court. Le minimalisme de ces habitations, l'absence de toute intimité, la vie en communauté traduisent bien la place et le rôle dévolus à l'Algérien en métropole. Ces foyers visent à contrôler la migration algérienne dans sa composition et dans son implantation géographique.

    La création par la préfecture de la Seine d'un foyer rue Crève-CSur après 1945 témoigne d'une des premières initiatives visant à développer un réseau de foyers en Seine-Saint-Denis. Validée par une circulaire en 1956, la gestion du foyer est confié à la Sonacotral, jusqu'à sa fermeture à la fin de l'année 1959, date à laquelle un nouveau foyer est construit, à proximité, à La Courneuve. En 1983, un projet de reconstruction d'un foyer de travailleurs migrants (FTM) est prévu par la SA d'HLM Travail et Propriété.

    Ce foyer est le seul, dans la banlieue de Paris, à proposer des chambres de 2 à 6 lits au maximum alors que le modèle dominant restait le dortoir collectif. Ce cadre d'habitat est modeste et sain, pratique des prix attractifs comparé à ceux des hôtels. Les prix varient en fonction du confort. En 1954, un lit coûte 90 francs par nuit pour des chambres de 4 lits soit un loyer mensuel de 2700 francs. Le salaire horaire d'un manSuvre algérien est d'environ 83 francs, soit 3984 francs par semaine. En 1959, le règlement intérieur limite la location et prévoit un renouvellement quotidien des contrats, ce qui empêche des installations véritablement durables, même si certains locataires résident dans le foyer de manière fixe.

    Ces foyers sont des assemblages de structures préfabriquées, de matériaux bon marché, construits très rapidement pour répondre à un afflux grandissant de la main d'Suvre. Le niveau très réduit de l'investissement dans la qualité du bâti provoque une dégradation rapide des édifices et les dégradations s'amplifient rapidement. Les autorités de tutelle rendent responsables les locataires de l'état de délabrement des logements, en stigmatisant leur mode de vie.

    Avant de disparaître, le foyer de la rue Crève-Coeur est utilisé à partir de 1955 comme palliatif transitoire, par la municipalité de Saint-Ouen, en accueillant des Nord-africains délogés du micro-bidonville de la rue Émile Cordon.

  • Sources complémentaires :

    Sources d'archives

    ●Archives municipales d'Aubervilliers

    IZ112, Main-d'Suvre algérienne.

    ●Archives départementales de Paris

    101/78/1/1, Notes pour le préfet pour sa visite à Aubervilliers (8 octobre 1960).

    ●Archives départementales de la Seine-Saint-Denis

    22W110, Population étrangère (1966-1968). Étude statistique des colonies étrangères du département de la Seine-Saint-Denis (mars 1966).

    1150W7, Habitat insalubre, foyer de migrants.

    1150W13, Étrangers: liste, état des foyers du département.

    1801W225, Foyers de travailleurs migrants.

    1801W227, Notes sur les logements immigrés.

    1801W229, Direction départementale de l'équipement. Carte des foyers de travailleurs migrants et cités de transit en Seine-Saint-Denis (1er janvier 1973). D

    1801W437, Logement des migrants en Seine-Saint-Denis (1972-1974).

    ●Archives nationales

    F/1a/5017, Circulaire documentaire, 40, 124 p. (décembre 1956).

    F/1a/5114, Recensement des foyers nord-africains (1955).

    F/1a/5046, Statistiques du ministère du Travail sur la main-d'Suvre nord-africaine en métropole (au 1er décembre 1953).

    F/1a/5047, Montagne Robert, Physionomie de l'implantation des migrants dans la Seine, Paris, excepté, Cahier n°10.

    F/1a/4814, Projets de logements en région parisienne (1951).

    408J, Fonds du Cent.

    SAN08235, Subventions d'équipement pour les foyers dans diverses villes (1949-1959).

    TR20192, Inspection des foyers (1956).

    TR20195, Liste des centres Sonacotra en région parisienne (1961).

    Sources imprimées

    Le Journal officiel , vol. 91, séance du 27 juillet 1948.

    Ressources audiovisuelles

    LOTAR Eli, Aubervilliers , Documentaire, noir et blanc, 24 minutes, 1946.

  • Références :

    AMANIR Khadija, La population immigrée à La Courneuve de 1911 à 1946, Mémoire de maîtrise, Paris, Université Paris 13, 1997, 116p.

    BERNARDOT Marc, «Chronique d'une institution : la "Sonacotra" (1956-1976)», Sociétés Contemporaines , n°33-34, 1999, pp.39-58.

    BERNARDOT Marc, Loger les immigrés. La Sonacotra 1956-2006 , Bellecombe-en-Bauges, Éditions du croquant, 2008, 296p.

    BLANC-CHALEARD Marie-Claude, «Les immigrés et le logement en France depuis le XIX e siècle. Une histoire paradoxale», Hommes et Migrations , n°1264, 2006, pp.20-34.

    DIAS José Martino, Aménagement de La Courneuve, 1924-1972 , Mémoire, Paris, Institut d'urbanisme de Paris, 1972, 152 p.

    FAUJOUR Pierre, La population d'une banlieue ouvrière : La Courneuve , Mémoire de maîtrise, Paris, Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne, 1978, 134p.

    FIEVET Michel, Le livre blanc des travailleurs immigrés des foyers : du non-droit au droit , Paris, L'Harmattan, 1999, 272p.

    GINESY-GALANO Mireille, Les immigrés hors la cité : le système d'encadrement des foyers (1973-1982) , Paris, L'Harmattan, 1984, 396p.

    HMED Choukri, Loger les étrangers «isolés» en France. Socio-histoire d'une institution d'État : la Sonacotra (1956-2006) , Thèse de sciences politiques, Paris, Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne, 2006, 669p.

    LACHIZE Samuel, «Aubervilliers, Les prolétaires ont-ils une âme ?», Cahiers de la Cinémathèque , n°59-60, 1994, 31p.

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    SAYAD Abdelmalek, «Un logement provisoire pour des travailleurs "provisoires"», Recherche sociale , n°73, 1980, pp3-31.

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    STORA Benjamin, Ils venaient d'Algérie. L'immigration algérienne en France 1912-1992 , Paris, Fayard, 1992, 492p.

    TAPA Guiza, Étude de la population étrangère dans une banlieue ouvrière: le cas d'Aubervilliers , Mémoire de maîtrise en géographie, Paris, Université Paris 4 Paris-Sorbonne, 1979, 204p.

    VIET Vincent, «La politique du logement des immigrés (1945-1990)», Vingtième Siècle , n°64, 1999, pp.91-103.

  • Légende/crédits :

    Légendes des documents numériques associés

    Doc 1 . Document attestant le projet (non finalisé) de la reconstruction d'un foyer pour travailleurs migrants datant de 1983 (dossier portant sur les permis de construire) , AM d'Aubervilliers.

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