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Dammarie-lès-Lys. Les camps d'internement des Juifs étrangers

  • Date :

    1940-1945

  • Notice historique :

    Suite à l'exode de l'été 1940 consécutif à l'avancée des armées allemandes, le retour des réfugiés en Seine-et-Marne donne lieu à la création de plusieurs camps provisoires destinés à l'accueil de ces «réfugiés de passage», comme on les appelle alors: trois centres principaux sont créés à Dammarie-lès-Lys, Provins et la Ferté-sous-Jouarre. C'est dans les dépendances de l'abbaye de Dammarie-les-Lys, fondée au XIIIe siècle, que sont logés les réfugiés. D'autres centres d'accueil existaient déjà sur le territoire, comme le foyer créé à Chelles en avril 1938 par l'ORT, association juive pour le développement du travail artisanal et agricole (en russe, Obshchestvo Rasprostraneniya Truda), et destiné à assister les réfugiés juifs autrichiens fuyant l'occupation de leur pays et les persécutions antisémites. Près de 600 personnes bénéficieront de cette assistance.

    Après la défaite des armées françaises en juin 1940, un régime d'occupation est instauré en France et l'armée allemande contrôle la zone occupée au Nord et à l'Ouest du pays. Après le départ des réfugiés, le premier centre de Dammarie-lès-Lys est conservé et se transforme en lieu de détention destiné en particulier aux Juifs étrangers de Seine-et-Marne. Cet internement succède aux mesures d'enregistrement pratiquées dès le début de la guerre, avant la mise en place du régime de l'Occupation par les autorités allemandes. Dès 1939, le Commissariat spécial de Police de Melun établit en particulier des fiches de renseignement sur les Juifs étrangers. Les Archives départementales de Seine-et-Marne conservent différents dossiers dans lesquels apparaissent des mentions tels que: Inutile à l'économie nationale ou avis favorable à l'internement.

    Suite aux premières ordonnances allemandes sur le statut des Juifs de septembre 1940, les préfets sont habilités à prévoir, sur décision administrative, l'internement des étrangers de confession juive. Alors que la synagogue de Fontainebleau subit de nombreux pillages depuis le début de l'Occupation, l'édifice est incendié en avril 1941 par des individus non identifiés. En juin 1941, la mesure d'internement est élargie aux Juifs français. Les premiers internés sont détenus à l'Abbaye de Dammarie-lès-Lys à partir du 16 juillet 1941. Ce site devient, par la suite, un camp de transit avant le renvoi vers d'autres camps similaires mais plus importants comme Beaune-La-Rolande, Pithiviers ou Drancy. Ces camps de transit sont les points de départ avant la déportation, à partir du premier convoi de mars 1942, vers les centres de mise à mort en Pologne, essentiellement Auschwitz-Birkenau.

    La décision d'imposer le marquage des Juifs par une étoile jaune, obligatoire en public, est prise en mai 1942 et étendue au département de la Seine-et-Marne. L'Informateur de Seine-et-Marne, journal officiel, indique alors:

    Il est rappelé que l'étoile juive doit être posée sur le côté gauche de la poitrine, solidement cousue au vêtement. Dans un certain nombre de cas, des juifs ont contrevenu à l'ordonnance sur le port de l'étoile juive, soit en n'en portant pas, soit en en portant plusieurs, soit en y ajoutant des inscriptions. Ces juifs ont été envoyés dans des camps de juifs. Un certain nombre de non-juifs qui portaient l'étoile juive ou une imitation de cet insigne et qui avaient ainsi manifesté leur sympathie pour le judaïsme, ont également été envoyés dans les camps de juifs.

    Dans l'arrondissement de Meaux, 722 étoiles sont distribuées. Des rafles ciblées ont lieu entre juin 1942 et mai 1944. Les sous-préfets communiquent à la Préfecture les listes complètes de Juifs recensés et les adressent aux autorités allemandes qui procèdent, avec l'aide de la gendarmerie française, aux arrestations, de groupes, de familles ou d'individus isolés. À Ozoir-la-Ferrière, en septembre 1943, la police militaire allemande (Feldgendarmerie) arrête une trentaine d'adultes et quinze enfants qui sont ensuite déportés. Le 22 octobre 1943, à La Ferté-sous-Jouarre, 14 personnes sont arrêtées dont Rose et Jean Helman, médecin, nés tous les deux en Roumanie et déportés à Auschwitz.

    Des sauvetages, notamment d'enfants, témoignent des différentes attitudes à l'égard des Juifs qui s'expriment dans la société française durant la guerre: avec le soutien de l'Ruvre de Secours aux Enfants (l'OSE), des religieux comme les sSurs de Notre-Dame-de-Sion ou des particuliers protègent et cachent des enfants juifs à Avon, Champs-sur-Marne ou Chelles. Plus de vingt Justes en Seine-et-Marne ont été reconnus par l'État d'Israël pour leur action.

    Suivant des lois spécifiques, les biens juifs sont mis en liquidation et des administrateurs provisoires prennent possession des immeubles, appartements et commerces. Des ventes de maisons appartenant à des Juifs sont adjugées à des personnes privées au bénéfice des liquidateurs. Au total, en France, 1,35 milliard d'euros (plus de 5,2 milliards de francs à l'époque) sont confisqués aux Juifs, en dehors des pillages des appartements et des Suvres d'art par les Allemands. Près de 75.000 Juifs ont été déportés, dont 75% d'étrangers, et 3.000 sont morts en France dans les camps d'internement. Sur les 75.000 Juifs français et étrangers déportés vers la Pologne dans l'un des 75 convois, seuls 2.600 ont survécu.

  • Sources complémentaires :

    Sources

    AD77,M5437, Enfants Israélites venant d'Allemagne. Hébergés au château de la Guette à Villeneuve-Saint-Denis (colonie Rothschild).

    AD77,SC50957, Application de la circulaire du 7 sept 1942 portant sur l'aryanisation économique : recensement des immeubles et entreprises israélites et réclamations diverses.

    AD77,M4334 à 4343, Sous-préfecture de Meaux, Dossiers concernant les persécutions antisémites.

    AD77,M4142, Sous-préfecture de Meaux, Application des lois contre les Israëlites: instructions, 1940-1944

    AD77,M4144 à 4148, Sous-préfecture de Meaux, Israëlites étrangers, ordres de réquisition, déclarations de commerce et de propriété, spoliations, recensement, instructions, 1940-1945.

    AD77,M4149-1 à 2, Sous-préfecture de Meaux, Insignes spéciaux en étoffe jaune portés par les Israélites (étoiles jaunes), 1942

    AD77,SC25825, Sous-préfecture de Provins, Israëlites, 1941-1947.

    Image :Modèle d'insigne spécial en étoffe jaune porté par les Juifs à partir de mai 1942, dit étoile jaune, collecté par les services de la sous-Préfecture de Meaux entre 1942 et 1944, Tissu imprimé, 18x15, AD77, M4149-1.

  • Références :

    AA.,VV., éd., 39-45 en Seine-et-Marne des lieux, des hommes&, Melun, Conseil général de Seine-et-Marne, 2005, 71p.

    FREDJ,Jacques, L'internement des Juifs sous Vichy, Paris, Centre de documentation juive contemporaine, 1996, 167p.

    FREDJ,Jacques, Les Juifs de France dans la Shoah, Paris, Gallimard, 2011, 223p.

    GRYNBERG,Anne, Les camps de la honte. Les internés juifs des camps français, 1939-1944, Paris, La Découverte, 1991, 399p.

    KLARSFELD,Serge, Mémorial de la déportation des Juifs de France, Paris, Les fils et filles des déportés Juifs de France, 2008, 436p.

    PESCHANSKI,Denis, La France des camps: l'internement, 1938-1946, Paris, Gallimard, 2002, 549p.

    POZNANSKI,Renée, Les Juifs en France pendant la Seconde Guerre mondiale, Paris, Pluriel, 1997, 712p.

    VIEY, Frédéric,Histoire des Juifs en Seine-et-Marne. Du Moyen âge à nos jours, Le Mée-sur-Seine, Lys Éditions Amatteis, 2005, 223p.

    VIEY Frédéric,Le livre mémorial des Juifs de Seine-et-Marne durant la Seconde guerre mondiale, 1940-1945, Bussy-Saint-Georges, Éditions la Plume et l'écran, 2008, 347p.

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