Champagne-sur-Seine. L'église russe depuis les années 1930
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Date :
Vers 1930
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Notice historique :
Construite en 1938, la petite église orthodoxe de Champagne-sur-Seine constitue un patrimoine original et conserve le témoignage du passé industriel de la commune. L'immigration russe dans cette localité est liée à l'histoire de l'usine Schneider bâtie en 1900, rebaptisée Jeumont & Schneider dans les années 1960. Cette usine fut le vecteur essentiel de l'essor industriel et démographique de la ville. Après la Révolution russe de 1917, un million et demi de Russes quittent leur pays pour échapper à la prison ou à la guerre civile. Plusieurs centaines d'émigrants s'installent dès les années 1920 dans la commune de Champagne-sur-Seine et forment rapidement une communauté soudée et organisée. L'usine Schneider recrute alors de la main-d'Suvre pour ses activités électriques en plein essor et construit des logements, des baraquements puis des immeubles où sont logés les ouvriers et leur famille. Les premières célébrations du culte orthodoxe ont d'abord lieu dans un petit local mais la communauté aspire à construire un édifice consacré.
La création en 1934 d'une association à la fois cultuelle et culturelle intitulée Colonie russe de Champagne-sur-Seine conduit, quelques années plus tard, à la naissance d'un projet d'église, établi par un architecte d'origine grecque, M. Popandopoulo qui avait déjà a son actif la construction d'autres églises orthodoxes en France. Commencés le 14 mai 1938, les travaux furent achevés rapidement et l'église fut consacrée le 24 septembre 1939 et dédiée a « Notre-Dame de Toutes les Protections », qui aurait détourné les forces ottomanes de Byzance assiégée. Chaque famille de la communauté russe versa, suivant ses moyens, une somme pour l'achat des matériaux et du terrain. Les hommes, pour la plupart ouvriers dans l'usine Schneider, édifièrent de leurs propres mains la petite église de Champagne-sur-Seine.
Construite sur une butte, a l'extrémité de la rue Grande qui traverse la commune, l'église surplombe la vallée de la Seine et l'usine. De taille modeste, elle a été construite à partir de matériaux courants, comme le ciment, le bois et la tôle: elle se compose d'un escalier, bordé de deux petites rampes en maçonnerie, et d'un édifice principal précédé d'un auvent et entouré d'un petit jardin. La toiture est surmontée d'un bulbe caractéristique peint en bleu. À l'intérieur, les murs portent encore les témoignages de la foi populaire des membres de la communauté russe: l'iconostase une cloison en bois décoré qui sépare, dans les lieux de culte orthodoxes, l'espace de célébration, réservé au clergé, du reste de l'église, des icônes réalisées notamment par une religieuse orthodoxe, des tableaux et des dessins composés par les fidèles forment un ensemble unique d'Suvres religieuses.
Dès sa création, l'église appartient à une association loi 1901 appelée la «Colonie russe» mais n'est pas considérée comme une paroisse orthodoxe de plein droit; un pope se déplace régulièrement à la demande des fidèles, pour célébrer la messe ou tout autre cérémonie religieuse. Après plusieurs décennies de fonctionnement et l'éparpillement de la communauté, l'église fut léguée, en 1982, par un acte de donation du président de l'association, Vladimir Alboull, à la commune de Champagne-sur-Seine. En 2001, la municipalité décida, avec l'aide de bénévoles, d'entreprendre des travaux de rénovation et d'entretien. En 2012, l'archevêque Michaïl de Genève et d'Europe Occidentale, en présence d'autres personnalités éminentes de l'église orthodoxe, a célébré une cérémonie de mémoire (panikhida) pour les «bâtisseurs de la chapelle», dont l'édifice constitue un témoignage rare de la présence de la communauté russe en France.
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Sources complémentaires :
Sources
AD77,M10186, Fêtes franco-russes. Souscription pour ces fêtes: extraits des registres de délibérations des communes, correspondance.
AD77,1R878, Officiers russes résidant dans le département, recensement: instructions, correspondance, 1919-1920.
AD77,M5586, Certificats d'identité des émigrés russes.
AD77,M5954, Étrangers. Réfugiés russes: demandes de certificats d'identité.
AD77,M5143, Surveillance des citoyens soviétiques, réfugiés russes ayant acquis la nationalité soviétique.
Image :Auteur inconnu, L'église russe de Champagne-sur-Seine, Image numérique, 2009 BenjaminSmith/WikimediaCommons.
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Références :
CHESNE,M., «La Communauté russe de Champagne-sur-Seine», Revue de Moret, n°122, 1991, pp.14-20.
GOUSSEFF,Catherine, L'exil russe. La fabrique du réfugié apatride 1920-1939, Paris, CNRS Éditions, 2008, 335p.
OSORGUINA,Tatiana Alekseevna, L'Émigration russe en Europe 1, 1855-1940, Paris, Institut des études slaves, 1990, 354p.
PONFILLY,Raymond de, Guide des Russes en France, Paris, Horay, 1990, 527p.