Cimetière italien de Bligny (Chambrecy, Marne)

  • Date :

    1919

  • Notice historique :

    Présentation du contenu

    Dès le début de la Première Guerre mondiale, des immigrés italiens s'engagent comme volontaires dans l'armée française. Le 4ème régiment de marche du Premier régiment étranger de la Légion étrangère est ainsi créé le 5 novembre 1914. Il prend très vite le surnom de « régiment des Garibaldiens » en souvenir de Giuseppe Garibaldi, grande figure de l'indépendance et de l'Unité italienne, qui était venu combattre aux côtés de l'armée française lors de la guerre de 1870. Surnommée les « Chemises rouges » à cause de leurs uniformes, la Légion garibaldienne compte dans ses rangs six petits-fils de Giuseppe Garibaldi. Ce régiment, commandé par Peppino, petit-fils de Garibaldi, est constitué d'environ 2 000 combattants volontaires italiens, originaires en majorité des régions françaises de forte immigration italienne (Midi, région lyonnaise, région parisienne), mais aussi des villes du nord et du centre de l'Italie. Certains proviennent d'autres pays européens, d'Afrique du nord et même du continent américain. Lazare Ponticelli (1897-2008), dernier combattant survivant de l'armée française lors de la Grande Guerre, décédé en 2008, a ainsi fait partie de ce régiment des Garibaldiens. Ayant seulement 16 ans en 1914, il ment sur son âge pour pouvoir s'engager sous les ordres du lieutenant-colonel Peppino Garibaldi.

    Les origines sociales et politiques de ces volontaires sont assez différenciées et les motivations d'engagement assez diverses. Certains donnaient un sens idéologique et militant à leur engagement, d'autres étaient partis à la guerre par amour du pays qui les avaient accueillis et nourris, permettant par là même, l'intégration par le sang, et enfin les marginaux, les aventuriers, les délinquants fuyant la misère et en quête d'aventures.

    Le régiment garibaldien est envoyé par le commandement français en Argonne et y combat de novembre 1914 à janvier 1915. Il s'illustre d'ailleurs dans des combats brefs mais meurtriers. Retiré du front le 9 janvier 1915 et envoyé au repos, il est dissout le 5 mars 1915 suite aux lourdes pertes - plus de la moitié de l'effectif - et devant l'entrée en guerre imminente de l'Italie aux côtés de l'Entente qui survient le 23 mai 1915. Au total sur les 2 000 hommes engagés, 590 Garibaldiens sont « morts pour la France », parmi eux deux frères Garibaldi : Bruno tué le 26 décembre 1914 à Bolante et Costante le 5 janvier 1915 à Courtes-Chausses. Après la dissolution de la Légion garibaldienne, la grande majorité des légionnaires rejoignent l'armée italienne tandis que d'autres, une centaine, s'engagent dans d'autres unités de la Légion étrangère.

    En 1918, à la demande du commandement interallié, l'Italie envoie 41 000 soldats combattre en France pour contrer les offensives allemandes en Champagne et sur le Chemin des Dames. Fin avril 1918, le IIe Corps d'Armée italien se trouve dans l'Aube où il doit s'adapter aux conditions particulières de combat en France avant de gagner le front. A partir de la mi-mai, il est engagé dans le secteur de l'Argonne, notamment près d'Avocourt, là même où la Légion Garibaldienne a combattu en 1914-1915. Au mois de juillet 1918, le corps d'armée est ensuite dirigé vers la Marne. Il participe aux combats de la seconde Bataille de la Marne près de Bligny, ainsi qu'à la dernière offensive alliée au Chemin des Dames.

    Par ce fait, le territoire de Bligny-Chambrecy accueille, depuis 1919, le cimetière militaire italien. Situé à 17 kilomètres à l'ouest de Reims, cette nécropole italienne, la plus grande sur le sol français, contient les sépultures des soldats italiens du 2ème corps mais également des Troupes Auxiliaires Italiennes en France (TAIF).

    D'une superficie de 3,5 hectares, le cimetière italien compte 3 040 dépouilles de soldats ainsi qu'un ossuaire de 400 corps. Dans ce cimetière, reposent aussi des Garibaldiens, tombés durant l'hiver 1914-1915. Ils furent d'abord enterrés dans l'ancien cimetière de Lachalade, dans la Meuse, avant d'être regroupés à Bligny. Les corps furent exhumés dès 1919, certains furent rendus aux familles.

    Un monument, érigé au début des années 1920 par l'Union des vétérans de l'Argonne et dédié à la Légion garibaldienne, se situe à l'entrée de la nécropole. Il se présente sous la forme d'un bloc de pierre où une plaque en bronze a été apposée. Réalisée par les fonderies Codari et Dubru, elle est l'œuvre du sculpteur italien Alberto Cappabianca. Cette plaque représente trois victoires tenant des couronnes de lauriers au-dessus des sites argonnais où les Garibaldiens se sont illustrés : Bolante, Courtes-Chausses et le Ravin des Meurissons. Une épitaphe témoigne de l'engagement de ces soldats au début de la Grande Guerre : « Ici reposent les os des anticipateurs de l'Argonne. Français et Italiens. Obéissez au commandement garibaldien ». Chaque année, le 2 juin - week-end précédant la fête nationale italienne - a lieu une cérémonie du souvenir dans la nécropole italienne de Bligny.

  • Sources complémentaires :

    Monument de Bligny : consulter le site verdun-meuse.fr (consulté le 16/05/13)

  • Références :

    OUVRAGES ET ARTICLES

    Berrafato Enzo et Laurent, Verney Jean-Pierre, L'Italie en guerre, 1915-1918 , Editions Soteca, 2006, 267 p.

    Camillo Marabini (Capitaine), Les Garibaldiens de l'Argonne , Editions Lacour, 2005, 335 p. (Première édition, traduction de G. Raybaz, préface de G. D'Annunzio, Paris, Payot, 1917).

    Heyries Hubert, Les Garibaldiens de 14. Splendeurs et misères des chemises rouges en France de la Grande Guerre à la Seconde Guerre mondiale , Serre Editeur, 2005, 670 p.

    Heyries Hubert, « La représentation française des garibaldiens en 1914-1915 », in La Grande Guerre, 80 ans d'historiographie et de représentations , colloque international, 20-21 novembre 1998, Montpellier, ESID, UMR 5609 du CNRS, 2002, pp. 239-263.

    Heyries Hubert, « Les Garibaldiens en Argonne », in François Cochet (dir.), Les batailles de la Marne, de l'Ourcq à Verdun (1914 et 1918) , Actes du colloque « Batailles emblématiques, combats oubliés », tenu à Reims et à Verdun les 6 et 7 mai 2004, Soteca, 14-18 Éditions, 2004, pp. 287-298.

    Heyries Hubert, « Français et Italiens en terre de France pendant la Grande Guerre : regards croisés », in Les populations et les armées , XIVe symposium international d'Histoire et de Prospective militaires, France/Italie/Autriche/Belgique/Maroc/Suisse.Pully (Suisse), 23-25 février 2006, Pully, CHPM, 2008, pp. 79-93.

    Heyries Hubert, « Le volontaire garibaldien d'une guerre à l'autre, 1914-1915 et 1939-1940 », in Hubert Heyriès et Jean-François Muracciole (dir.), Le soldat volontaire en Europe au XXe siècle, de l'engagement politique à l'engagement professionnel , colloque international du 3 au 5 avril 2003, Montpellier, PULM, 2007, pp. 193-210.

    Milza Pierre (dir.), Les Italiens en France de 1914 à 1940 , Palais Farnèse, Ecole française de Rome, 1986, 787 p.

    Sapori Julien, Les troupes italiennes en France pendant la Première Guerre mondiale, Le Chaufour, Editions Anovi, 2008, 139 p.

    PRESSE

    « Les Garibaldiens, héros de l'Argonne », in La Charte , mai-juin 1975, 46ème année.

    « Les Garibaldiens en Argonne » in Connaissance de la Meuse , Numéro 58, Septembre 2000.

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