Actions en Algérie

  • Date :

    1956-1975

  • Biographie ou histoire :

    Présentation du producteur

    L'intervention de la Cimade en Algérie a été étroitement liée à ses activités d'entraide en France et aux contacts qu'elle a entretenus aussi bien avec les représentants des pouvoirs publics en France et en Algérie qu'avec le FLN et le Croissant Rouge algérien en Europe, puis le Gouvernement provisoire de la république algérienne (GPRA) GPRA à Tunis, et aussi avec des églises protestantes étrangères et le Conseil Œcuménique des Eglises (COE) à Genève qui apportaient un soutien à ses actions, ainsi que des mouvements catholiques et des associations humanitaires.

    En Octobre 1956, le Secrétaire Général du COE mena une enquête sur la situation en Algérie. Depuis le début du conflit, le COE était préoccupé du fossé que cette guerre creusait de plus en plus profondément entre français et populations musulmanes d'Afrique du Nord. Ayant constaté au cours de sa visite à Alger que des relations d'amitié existaient malgré la guerre, entre quelques protestants français et quelques Algériens, il proposa aux églises protestantes d'Algérie de faire appel à la Cimade pour intensifier ces contacts et établir un service précis d'aide à la population algérienne très éprouvée par le conflit.

    La mission exploratoire d'une équipière en juin 1957, confirmait la possibilité d'introduire une présence Cimade en Algérie, sans pouvoir définir en quoi consisterait exactement le travail, tant il y avait à faire dans tous les domaines. La première équipe partit à l'automne 1957 et s'installa quelques mois plus tard dans un quartier populaire de la banlieue d'Alger, au Clos Salembier. Il ne s'agissait encore que d'un petit poste dont la présence amicale, gratuite, allait permettre de rendre des services dans les domaines social et éducatif et de tisser des liens avec des habitants du quartier. Les équipières pouvaient ainsi mesurer, au quotidien, les injustices subies par la population algérienne, conséquences d'un système colonial mis en cause dans cette guerre, de même que les souffrances engendrées par celle-ci (pas une famille n'était intacte et un nombre croissant de réfugiés, fuyant les opérations militaires dans les campagnes, venait augmenter la population des bidonvilles en vivant dans des conditions extrêmement précaires).

    En 1959, la situation de centaines de milliers de familles, chassées de leurs villages à cause du développement des opérations militaires et regroupées par l'armée française, est révélée en France par une enquête menée par le directeur du Secours Catholique : les populations dans les centres de regroupement sont privées de leurs moyens de subsistance habituels. La misère est extrême. Beaucoup d'enfants meurent de malnutrition ou faute de soins. En mai 1959, un appel concernant cette situation, lancé conjointement par le Cardinal Feltin (archevêque de Paris) et le pasteur Boegner (président de la Fédération Protestante de France) a un grand retentissement. Au mois d'octobre, un numéro spécial de l'hebdomadaire “ Réforme ” relate la visite accablante de plusieurs de ces centres, dans le département du Titteri, par le Secrétaire Général de la Cimade. Celui-ci décide de mettre en place, dans l'urgence, avant l'hiver, un réseau de distribution de vivres, vêtements et couvertures.

    Grâce aux dons reçus d'églises étrangères et de France, les distributions et l'aide alimentaire continueront pendant toute la durée de la guerre. Elles seront organisées de façon systématique à partir de 1960, à une plus vaste échelle et en dehors des structures militaires, avec l'aide de bénévoles et de paroisses protestantes d'Algérie, parallèlement à l'action de l'organisation catholique Caritas.

    D'autres interventions furent également décidées, en direction des réfugiés et regroupés, dans le département du Titteri :

    - Poste de Médéa : dans cette ville, située à 80 km au sud d'Alger, qui avait 7.000 habitants au début de la guerre et en comptait 21.000 en 1959, 70.000 en 1960 (Médéa et ses environs), les conditions de vie des familles réfugiées étaient particulièrement précaires. Entassées dans les caves, dans les cours et les greniers ou dans des bidonvilles, elles étaient exposées aux maladies infectieuses, tout particulièrement les enfants. Un “ centre aéré ” fut construit et ouvert en 1960, dont le but essentiel était la prévention et la lutte contre la tuberculose : détectée par un médecin responsable de l'hôpital militaire, cette maladie touchait environ 60% de la population réfugiée. Les enfants les plus exposés (et ceux et celles qui les accompagnaient) étaient accueillis chaque jour pour un repas et un goûter, des activités éducatives et un suivi médical. Un grand nombre de femmes étaient chefs de famille et sans ressources, les hommes ayant disparu (morts ou partis au “ djebel ”). Le développement d'une activité artisanale (tissages, poteries) permit à environ deux cent d'entre elles d'assurer la survie de leur famille. A la cité Leclerc, un dispensaire fut ouvert et des activités développées avec les adolescents (création de jardins potagers, rattrapage scolaire).

    - Poste de Sidi Naamane : situé sur le territoire d'une Section administrative spécialisée (SAS), ce centre de regroupement faisait partie du programme des “ Mille villages ”. Avec la présence de deux infirmières confirmées, la Cimade y développa une action médicale : dispensaire, petit hôpital provisoire, mais aussi diverses autres activités : avec les femmes et les adolescentes post-scolarisées, cours d'alphabétisation pour les hommes, suivi médical et aide alimentaire pour des familles particulièrement démunies vivant en marge du regroupement.

    Répondant à un souhait du Croissant Rouge algérien dont le Président était installé à Genève, et qui, sur le terrain, souhaitait élargir les activités humanitaires déjà engagées au profit des populations regroupées par l'armée française, la Cimade envisage la mise en route d'une équipe dans l'Est algérien.

    - Aide alimentaire : un équipier recruté pour la coordination des actions dans le Constantinois, commence à organiser des secours sous forme de distributions de vivres dans les Aurès et d'autres régions du Constantinois. Très rapidement, la question du sens des distributions gratuites de l'aide alimentaire est posé : comment créer une nouvelle relation qui redonne aux populations leur dignité ? Après quelques mois, une reconversion “ vivres contre travail ” est étudiée et mise en place, d'abord dans les Aurès, à Belkitane où un chantier de reboisement est organisé : les ouvriers reçoivent un salaire en vivres, en échange de leur travail. Des dizaines de milliers d'arbres vont ainsi être plantés.

    - Poste de Belkitane : en novembre 1961, une équipe s'installe au sud de Constantine, dans un village au pied des Aurès, dans une région particulièrement démunie et y développe le même type d'intervention qu'à Sidi Naamane.

    - Reboisement : fin février, un projet de reboisement est mis en place avec le service de Défense et Restauration des Sols. Dès le cessez-le-feu, une équipe est constituée et des chantiers de reboisement, avec un encadrement algérien, sont ouverts en plusieurs endroits. A Bouhamama, des chantiers nettoient la forêt qui avait brûlé pendant les bombardements au napalm. Par la suite, cette opération fut largement développée, avec une prise en charge progressive par le gouvernement algérien et le bénéfice de financements importants (Programme Alimentaire Mondial de la FAO). D'autres activités en découlèrent (agriculture, hydraulique, prestations aux éleveurs, santé).

    A l'Indépendance, la Cimade poursuit son action dans le cadre d'une structure plus vaste, créée en mars 1962 par le Conseil Œcuménique des Eglises : le Comité Chrétien de Service en Algérie (CCSA). Expression d'une solidarité œcuménique et internationale avec le peuple algérien, le CCSA, met en route dès l'été et l'automne 1962, un vaste programme d'entraide matérielle, de formation de cadres, de développement communautaire et de reconstruction. La Cimade travaille en partenariat avec cet organisme en mettant en place des équipes “ professionnelles ”à Alger (enseignement), Médéa (enseignement et santé), Constantine (enseignement général et paramédical, personnel soignant), Belkitane (travail socio-éducatif).

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