Images des femmes immigrées dans Odysséo (1963-2010)
Le 26/06/2013 à 11h22 par Génériques
Résumé

A l'occasion de la journée de la femme, Génériques souhaite aborder la question de l'histoire des femmes immigrées en France et de la manière dont ces dernières sont représentées dans les sources de la seconde moitié du 20e siècle. A cet effet, une étude de leur présence dans les collections d'affiches mises en ligne dans Odysséo et dans les périodiques portugais numérisés, sources essentiellement issues d'archives militantes, a donc été entreprise.

Les affiches militantes de l'immigration (1970-2010)

 

Sur ces affiches, les femmes apparaissent aux côtés des hommes, actives et engagées dans les luttes pour les droits des immigrés en général, participant par exemple aux grèves et manifestations de soutien des travailleurs. Elles mènent également une lutte pour leurs droits en tant que femmes immigrées ou issues de l'immigration, se rassemblant au sein d’associations de femmes autonomes ou de sections féminines d'association d'immigrés. Elles exposent leur cause par le biais de rassemblements, colloques, représentations théâtrales etc. Mais le combat pour le droit des femmes immigrées en France est aussi porté par des organismes non exclusivement féminins ou issus de l'immigration qu'ils soient institutionnels, associatifs, partisans ou syndicaux.

Les revendications des droits des femmes immigrées touchent le domaine de la reconnaissance professionnelle, sociale, et culturelle. Leurs talents et savoir-faire sont ainsi souvent mis en avant : il s'agit de donner plus de visibilité à cette population jugée « moins visible », à travers par exemple des expositions ou des conférences. Certaines actions visent à endiguer des pratiques vécues en France comme exogènes, importées des pays d'origine, comme l'excision ou les mariages forcés, ou à sensibiliser cette population jugée fragile aux dangers qui pèsent sur elle comme le SIDA. Enfin, des campagnes sont menées pour le droit des femmes dans leur pays d'origine notamment en Algérie.

A travers ces documents, il est ainsi possible d'analyser les images et les représentations des femmes immigrées dans la société française.

 

Les femmes dans les périodiques portugais édités en France (1963-1978)

 

Parmi une vingtaine de publications en langue portugaise que compte le catalogue Odysseo, la figure de la femme apparaît dans la revue Sementeira et assez régulièrement dans les périodiques O Alarme, O Salto, Tribuna do Imigrante, Coleçao do Povo, Jornal Português, et O Trabalhador.

Les périodiques cités ci-dessus ont été publiés surtout dans la première moitié des années 70, sauf O Trabalhador qui paraît entre 1963 et 1978. Ils ont dédié plusieurs de leurs pages à des problématiques jugées féminines telles que les méthodes contraceptives, l’avortement, le droit à la maternité ou les droits des femmes enceintes, la double journée de travail, le machisme dans le milieu professionnel (notamment les différences salariales) et au sein de la famille. Ils ont également consacré des articles à la vie des paysannes au Portugal, puisqu’une partie des immigrées qui travaillaient en France à l’époque des publications étaient originaires de milieux ruraux frappés par la pauvreté et par la mécanisation agricole. Les mouvements de grève organisés par les immigrées portugaises dans les usines en France sont aussi évoqués dans ces périodiques.

L’éducation des enfants est une autre problématique qui a concerné ces femmes notamment les mères célibataires, ainsi que celles qui avaient laissé leur enfant au Portugal. D’ailleurs, des rubriques présentent des informations juridiques relatives au regroupement familial. En outre, l’enseignement du portugais dans les écoles primaires est présenté dans plusieurs articles comme constituant un aspect important pour la préservation de la culture portugaise. L'alphabétisation des femmes, surtout celles issues des couches rurales, est aussi évoqué. Il concerne à la fois l’apprentissage du français et du portugais pour ces dernières qui ont eu un accès restreint à l’école dans leur pays d’origine.

 

Images des femmes immigrées portugaises

Les témoignages féminins publiés dans ces périodiques nous ont légué plusieurs représentations des femmes portugaises immigrées en France. Qu’elles exercent les professions de femmes de ménage, de "bonnes à tout faire” , d’ouvrières, qu’elles soient jeunes, âgées, mères, célibataires ou mariées, les femmes immigrées portugaises sont le plus souvent décrites comme travailleuses et courageuses. Des qualités notamment mises en avant dans les périodiques le 8 mars, à l’occasion de la Journée de la femme.

Il faut rappeler que ces publications politiquement à gauche revêtaient un caractère pédagogique et se donnaient pour mission d’informer et de former les travailleurs. Ces derniers étaient encouragés à participer à la lutte des classes et les travailleuses portugaises étaient appelées à unir leurs forces à celles des hommes contre la bourgeoisie capitaliste et l’impérialisme. La CGT, qui a édité O Trabalhador, a par exemple organisé en novembre 1970, à Issy-les-Moulineaux, en Ile-de-France, des conférences nationales sur la main d’œuvre féminine. Le syndicat insistait sur le fait que les femmes non françaises étaient doublement concernées par la participation politique en raison de leurs conditions de femmes et d’immigrées.

Dans ce contexte s’inscrivent plusieurs hommages aux femmes combattantes (africaines, chinoises, vietnamiennes, japonaises, albanaises, uruguayennes, etc.) des guerres coloniales et anti-impérialistes. En opposition à cette lutte des classes, le féminisme apparaît comme une idée bourgeoise divisant les travailleurs comme nous pouvons voir dans un article de O Alarme. De ces différents discours ressort l’instrumentalisation de l’image de la femme dans ces périodiques. Malgré cela, ces documents demeurent des sources importantes pour retracer l’histoire des femmes portugaises en France.


Melting post : Catarina Eufémia, une figure de la gauche portugaise

Catarina Eufémia est une figure importante de l’histoire portugaise évoquée à plusieurs reprises dans les périodiques portugais édités en France. Elle est associée à la Journée de la femme ainsi qu’à celle du travail (1er mai). Catarina Eufémia était une paysanne portugaise née en 1928. Elle est décédée en 1954 sous le feu de la Garde Nationale Républicaine à Baleizao, dans la région de l’Alentejo, à l’occasion d’une grève de salariés ruraux qui réclamaient une augmentation de salaires.

Voir le post

 

Paru en mars 2012.

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