La contre-bande dessinée des années 1980 : focus sur les archives iconographiques de l'artiste José Jover
Le 22/01/2018 à 09h43 par Génériques
Résumé

Une importante sélection de documents iconographiques originaux (planches de bande-dessinées, croquis, crayonnés, études sur les personnages) provenant de la collection privée de l'artiste José Jover est désormais disponible dans Odysséo. Cette collection vient mettre à l'honneur les travaux du collectif Anita Comix (Farid Boudjellal, José Jover et Roland Monpierre), collectif créé dans les années 1980 travaillant sur le détournement de stéréotypes racistes par l'utilisation de la caricature satirique.

Émergence de la « contre-bande dessinée » dans les années 1980

 

« En tant que récit, la bande dessinée possède des ressources supérieures au simple dessin quand il s'agit de formuler une réponse aux discours aliénants. Par ailleurs, la nature mixte - visuelle et textuelle - de la bande dessinée lui permet d'être polygraphique et polyphonique, c'est-à-dire de reproduire des images dessinées et des mots dits ou écrits par d'autres, afin de les dialogiser, montrant qu'ils sont périmés et les remplaçant par de nouveaux, plus adaptés à un monde transformé. Si une affiche peut frapper fort avec une image et un texte saisissants, une bande dessinée est capable de déficeler les récits préfabriqués et d'en proposer des novateurs »1.

 

Les années 1980, marquées par la Marche pour l'égalité et contre le racisme et Convergence 84, ont permis l'émergence de nouvelles formes d'expression artistiques comme la « contre-bande-dessinée » dont Larbi Mechkour, José Jover, Roland Monpierre et Farid Boudjellal sont particulièrement emblématiques. Dans la mouvance de l'avant-garde situationniste, des groupes d'immigrés s'auto-représentent en se réappropriant stéréotypes et clichés raciaux et utilisent le discours caustique, la caricature et l'imagerie de la bande dessinée comme moyen d'expression et de revendication. Certains de ces artistes ont publié dans les revues Révolution, Sans Frontière et Baraka.

 

Pour en savoir plus, consultez l'exposition virtuelle « Cultures et contre-cultures de l'immigration, 1970, 1980, 1990 ».

 

 

Parcours de José Jover et création du collectif Anita Comix

 

José Jover est un bédéiste issu de l'immigration espagnole. Dans sa jeunesse, il rencontre Farid Boudjellal en fréquentant le marché aux puces de Toulon et ils se lancent ensuite ensemble dans le dessin. En juin 1975, José Jover entre aux Beaux-Arts de Paris où il rencontre Roland Monpierre avec lequel il crée un atelier de BD avec le journal Le vent. En 1981, José se rallie à ses deux camarades, pour créer ensemble le collectif Comix Studio, qui sera appelé par la suite Anita Comix.

 

De nombreux personnages émergent de leurs créations. Aziz Bricolo par exemple, est un enfant qui, de par son tempérament bricoleur, résout toujours les problèmes de sa cité. Autre exemple avec les Rois Mages, où les trois auteurs se caricaturent en se faisant appeler Melk, Gasp' et Balt'.

Certaines de leurs histoires ont suscitées une importante polémique à leur parution. C'est le cas de « Procès Barbie » paru dans Libération pour lesquels les auteurs ont été accusés de tenir des propos stigmatisants et ont du justifier leur démarche artistique dans une lettre ouverte.

 

 

FOCUS : expressions artistiques du mouvement Convergence 84

Le mouvement Convergence 84 pour l'égalité » fait suite à la Marche pour l'égalité et contre le racisme ayant réuni plus de 100 000 personnes le 3 décembre 1983 à Paris. Autour du slogan « La France, c'est comme une mobylette, pour avancer, il faut qu'il y ait du mélange », cinq cortèges au départ de Marseille, Toulouse, Brest, Lille et Strasbourg convergent ainsi vers Paris le 1er décembre 1984. Ils sont environ 30 000 à l'arrivée.

 

Le collectif Anita Comix s'est impliqué dans l'appel au mouvement Convergence en produisant affiches et bandes dessinées. Sur la moto, symbole des « rouleurs » de Convergence 84, les auteurs José Jover, Farid Boudjellal et Roland Monpierre s'auto-représentent. Avec la bande-dessinée « Les as du 9e art », ils détournent des stéréotypes raciaux et xénophobes – arbre à cartes de séjour, boîte de nuit appelée « A l'immigré dansant », apparition de Mecanic Bamboula... – en utilisant la caricature satirique.

 

Pour en savoir plus, consultez l'article « La Marche de 1983 et Convergence 84 chez les dessinateurs de bande dessinée issus de l'immigration ou contre-bande dessinée » de Mark Mckinney, Migrance n°41 « La Marche pour l'égalité et contre le racisme », 2013.

 

Paru en janvier 2018.

 

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Extrait de l'article « La Marche de 1983 et Convergence 84 chez les dessinateurs de bande dessinée issus de l'immigration ou contre-bande dessinée » de Mark Mckinney, Migrance n°41 « La Marche pour l'égalité et contre le racisme », 2013.

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