El Ouafi, Ahmed Bouguera

  • Date :

    1899-1959

  • Notice historique :

    El Ouafi, Ahmed Bouguera (Ouled-Djellal, Algérie, 1899-La Plaine Saint-Denis, 1959). Ahmed El Ouafi, athlète d'exception, est l'un des rares Français médaillés d'or aux Jeux Olympiques d'Amsterdam en 1928. Tombée longuement dans l'oubli, sa figure est en cours de réhabilitation. Né dans le Constantinois, c'est lors de son service militaire qu'un officier remarque ses dispositions athlétiques. En 1923, il débarque en métropole pour participer à des championnats militaires d'athlétisme. Ses qualités sont telles que la Fédération Française d'Athlétisme le retient pour participer aux Jeux Olympiques de Paris en 1924 : ses qualités d'endurance lui permettent de se classer à une belle 7e place. Cette performance ne permet pas à El Ouafi d'accéder à la notoriété. Pour gagner sa vie, il est contraint de travailler comme manœuvre dans les usines Renault de Billancourt et devient logiquement sociétaire du club de l'usine, le CO Billancourt dans le cadre duquel il s'entraîne après le travail. Préparé par un ancien crossman, Louis Corlet, Ahmed El Ouafi remporte le championnat national du marathon en 1927 et se qualifie une seconde fois pour les Jeux Olympiques. Il est loin d'être favori à Amsterdam, le 5 août 1928, mais, régulier et déterminé, il arrive en tête du marathon et donne à la France une prestigieuse médaille d'or. La presse française anticolonialiste ne manque pas de souligner l'origine de ce champion. L'Humanité titre en jubilant : « Enfin une victoire française ! c'est&ô ironie&celle de l'Arabe El Ouafi ». Les autres journaux, dont L'Auto, ne donnèrent pas à cette victoire l'éclat que l'on pouvait attendre. Mal conseillé et peu considéré, El Ouafi ne parvient pas à profiter de son talent. Cédant aux offres d'un patron de cirque américain, il participe à des exhibitions aux États-Unis face à des athlètes locaux. Il se produit également dans des courses de foire, face à des chevaux ou autres animaux. Cette aventure qui ne l'enrichira guère, lui vaudra d'être radié par la Fédération Française d'Athlétisme. De retour en France, sa reconversion s'avère difficile : avec ses maigres économies, il achète un café dans le quartier de la gare d'Austerlitz au milieu des années 30. Mais l'affaire marche mal, et, victime de plusieurs escroqueries, El Ouafi connaît rapidement des problèmes financiers. Durant les deux dernières décennies de son existence, il vit d'expédients dans une situation d'extrême dénuement. Il faut attendre la victoire d'Alain Mimoun autre Algérien au Marathon des Jeux Olympiques de Melbourne en 1956 pour que celui-ci tente de le sortir de l'ombre en l'invitant à l'Élysée lors de la réception donnée en son honneur. El Ouafi n'est plus alors qu'un vieillard édenté, délaissé de tous. En 1959, il trouve la mort lors d'une fusillade à Saint-Denis. Enterré furtivement au cimetière musulman de Bobigny, Ahmed El Ouafi disparaît définitivement de la mémoire du sport français. A l'image du statut des indigènes, un champion algérien n'était pas un champion français à part entière : le parcours douloureux de cet athlète oublié révèle l'impossible célébration dans la France coloniale de champions indigènes.

  • Sources complémentaires :

    SOURCES IMPRIMÉES

    L'Humanité , 6 août 1928

    Idem, 4 septembre 1995, article de Patrice Pierquet.

    Idem , 21 septembre 2002, article de Frédéric Sugnot.

  • Références :

    OUVRAGES ET ARTICLES

    Gastaut Yvan, « Ahmed Bouguera El Ouafi », in Migrance , numéro 22, « Sport et immigration : parcours individuels, histoires collectives », Génériques, deuxième trimestre 2003, pp.10-11.

    DOCUMENTAIRES

    Gastaut Yvan, Dalmar Arnaud, El Ouafi ou la gloire ne dure que 42,195 kilomètres , 52mn, 2013. Disponible sur le site Internet de France Culture, émission La Fabrique de l'Histoire

  • Légende/crédits :

    Auteur de la notice

    Yvan GASTAUT

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